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Lacan #4 – RSI – Remplissage des Surfaces Imprimées

»L'existence, ça n'est pas tout« (Jean Baudrillard)

»Rien n'est tout« (Jacques Lacan, Vincennes, Décembre 1969 (»Analyticon«)

Un Lacan 4 après tant de temps? Alors que 3 pattes suffisaient amplement à ce que ça tienne debout tout seul? – Oui enfin, quatre fois Lacan dans une revue comme celle-ci, ça ne me semble pas de trop non plus. 4 fois, c’est toujours ça de pris sur la Lacanie-métastasée des temps middle-term actuels, non? Et si tu ne sais pas toi-même, n’attends pas de nous des lumières, bien au contraire. – Voilà donc une première raison, toute fumeuse et gratuite, qui peut nous donner l’envie d’y revenir: juste pour le plaisir. Et gardons par-devers nous l’idée qu’un tel plaisir est précisément ce que s’interdit avec méthode cette certaine Lacanie. Amen! Une paire et un de trop, donc.

»L’on ne cherche [aux spectacles] qu’à s’étourdir et s’oublier soi-même, pour calmer la persécution de cet ennui qui fait le fond de la vie humaine depuis que l’homme a perdu le goût de dieu!« (Jacques-Bénigne Bossuet, »Maximes et réflexions sur la Comédie«).

4X4, quattro, quadri, etc. … Je saute comme de bien entendu sur ce que le à trois va permettre à toutes et tous de trouble, de traviole, d’en équilibre plus que pas net et autres jeux qui font se multiplier le plaisir comme deux fois deux ou cinq moins un, bien sûr. J’annonce la couleur sans prendre aucune assurance, pari, garantie sur les risques de l’opération, du tout. – Et sans envers ni endroit, car après tout, le savoir, c’est de la copulation de signifiants dans l’inconscient ; et dans tous les sens si possible. – Comme nous le disait le multiple Jean Yanne: »Peut-on rire de tout? – On peut surtout rire de rien depuis que les rires sont enregistrés.« Jean Yanne est un grand acteur. – Il n’est pourtant pas toujours besoin d’aller chercher bien loin pour que quelque matière à rire se donne à nous …

Aucun crime à se donner du plaisir. Alors pourquoi pas, après tant de temps, un Lacan 4 qui viserait à faire un état des lieux de ce qui, depuis la dernière fois, s’est passé (passoire et passifs) autour de Lacan (édition, institution, distribution des cartes)? – (Oui oui oui, dites-nous tout! Allez, raconte un peu qu’on se marre, des fois qu’il y aurait de sérieuses similitudes avec partout ailleurs) – Chacun se chargeant déjà de défendre sa propre peau, n’allons donc pas nous en inventer une, juste pour la défendre, ni non plus chercher un endroit de libre sur cet os qui se ronge. C’est complet ! Un vrai désordre. – (»Je pisse bien tout autour de la cuvette et ensuite, si on demande, je dis que c’est pas moi«. Moi, je dis toujours ce que je vais faire avant, comme ça personne ne me pose plus la question; mais enfin, l’art et la manière, hein …). – S’il fallait pourtant choisir un moment pour se lancer dans un tel bilan, eh bien l’on n’en trouverait certainement pas de plus idéal ni de plus drôle qu’aujourd’hui. – (Comme quoi, Lacanien, ça ne vaut pour personne, et surtout pas Lacan même) – »Mais oui, car c’est aussi un peu ça: Que Lacan m’aime! Et s’il ne m’a pas aimé, voici des actes pour lesquels il m’aimera«. Se convaincre d’une telle chose est certes plutôt du domaine de la foi, mais rassurez-vous: »ils n’y croient plus eux-mêmes!«. Le transfert n’est que de l’amour, mais la réciproque n’est définitivement pas valable, tant l’amour appelle à lui si facilement la haine. Laissons plutôt faire, car c’est strictement réservé aux amateurs du genre. A moins que … essayez donc de nous en faire un bon programme de real-TV et puis on verra, puisque désormais, c’est là que se règlent dans la joie les affaires de famille. Exigeons d’en jouir nous aussi! – Du tout le même programme que: »Fais à l’autre ce qu’il aime qu’on lui fasse. Si tu n’aimes pas ça, laisse tomber.« (Philippe Sollers).
Si l’on conserve ce fil, ce titre »Lacan«, c’est évidemment parce que depuis le début, il nous permet bien plus que ce qu’il semble avancer à première vue. Bien entendu, il existe quantité de classes pour jouer du dogme, mais posons-y un contrepoint: le sens de Lacan n’est pas à chercher dans la doctrine. – (Voila, exactement. Lacan, on pourrait ici vous le présenter aussi pour ce qu’il semble ne plus permettre du tout chez ceux qui l’arborent en pin’s au veston ou à la blouse et en symptômes sur la gueule comme en-dedans le sujet, se clamant »Lacanien« comme d’autres sont trashmétalliens, néokantiens ou Raeliens.) – La marque est maintenant déposée, les étiquettes sont imprimées; reste alors ce choix à chacun: Total look ou No logo. Mais on peut aussi préférer le sur mesure, ou pourquoi pas le dégriffé de luxe. Question de goût. D’autres préfèreront la fripe, déjà usée, ce qui s’accorde d’ailleurs parfois assez bien avec leur Lacan second hand (déjà porté et bien râpé). La somme des nuances et mélanges permise par l’entre-deux est bien la plus conséquente, mais elle n’intéresse personne. – Vous lisez, vous? Quoi ça? Le Code da Vinci? Ah bon … (rires). Comme quoi … alors, No Logo ou No Gogo? Gogo-promotion ou bien juste les soldes en tout? On n’en finira jamais et c’est bien ce qui me fait bander encore et toujours. Mais non! Ni le protestantisme, ni la névrose, ni les shopping centers ne sont des devoirs! – Et là, l’ultime faute de goût qui reste à faire est d’en plus s’y croire original, là-dedans. »Ma névrose est originale«. Bien sûr que non! … Et ne vas surtout pas t’en convaincre parce que ton analyste t’accueille en instaurant ceci: »Allez-y, dites n’importe quoi, ce sera merveilleux«. Pas original! Ni d’ailleurs d’afficher Dan Brown, Lacan, Donatien ou Kylie. Mais ensuite, charge à chacun d’en faire quelque chose. Ne pas s’interdire d’en jouir est une première possibilité – On n’est pas en famille, bien au contraire. T’es toi, c’est tout. Tu t’arranges donc sans nous. Merci pour lui, on lui dira, sans faute. Pierre Dac, vous connaissez? Il disait ça qui est loin de la connerie: »Ce n’est pas parce qu’en hiver on dit: »Fermez la porte, il fait froid dehors«, qu’il fait moins froid dehors quand la porte est fermée.«

»Qu’on dise reste oublié derrière ce qui se dit dans ce qui s’entend« (Lacan, (»L’étourdit«).

Au-delà de son enseignement, le jouis-sens de Lacan est peut être à chercher dans les positions qu’il a su s’inventer: d’un geste, le retour à Freud (»Je serai celui qui aura su lire Freud«) ; d’un autre, le Séminaire (»Je serai celui qui dira«); et puis les Ecrits, mal lisibles. Un peu mégalo? Bien trop simple! Supposons qu’il a su loger son propre plaisir et s’y concentrer, avec méthode (tout comme Sade était particulièrement méthodique avec cette chose très sérieuse pour lui qu’était sa propre jouissance) … et puis surtout: se foutre royalement du reste. Durant le Séminaire, aucune occasion n’était manquée de cogner sur la masse qui s’y pressait, comme pour dire à chacun: »Je vous aime bien, mais faites quand même un effort!« Demeurent les Ecrits, abrupts et mal vieillis dans leur style. Et pourtant, on ne le dit pas assez à ceux qui s’y collent en cherchant à y comprendre un bout, mais: lisez-le au moins une fois, en ne goûtant qu’au style, car ça a déjà de la gueule en soi. Des vagues complexes et ciselées, une scansion toujours prête à nous faire trébucher, mais peut-être simplement pour nous y faire retourner. Et libre à vous d’en reprendre une deuxième fois, on ne sait jamais. Là encore, plutôt joueur, il n’hésitait pas à dire que ses Ecrits étaient d’abord faits pour être lus avant d’être compris. Pour autant, ce qui nous reste aujourd’hui, c’est ce qui se structure autour de l’absence de Lacan. Une parole qui se fige à l’écrit, tant bien que mal, et voici que s’annoncent aujourd’hui des disques du Séminaire. Simple produit dérivé ou objet nécessaire pour faire oublier l’absence du corps? C’est hasardeux, mais tentons d’extraire de Notre Lacan tout ce qui est psychanalyse … ce qui reste, c’est un souffle. »J’entends sa voix de temps en temps faire surtout des soupirs.« (»Sollers à propos de Lacan«, 2002)
. Ce souffle, c’est aussi le »qu’on dise« qui permettra de porter la parole, et c’est précisément ce qui reste oublié. La voix, les scansions qu’elle insuffle dans la parole, était sans aucun doute un mode privilégié de présence du corps de Lacan. Alors après tout: que le Séminaire existe sur disque, si c’est le support qui peut le mieux en restituer l’intention, et qu’on n’en parle plus. Mais les équivoques sur lesquelles on bute depuis toujours seront à prendre avec, au prix de gros et pareil pour tout le monde. Chacun se débrouillera avec l‘??uvre brute, et qu’on ne pinaille plus sur les modalités de son passage au texte, sur la virgule à déposer ici plutôt que là-bas. Tout le monde d’accord ! Et lui qui s’imaginait en 1974 que d’ici 10 ans, ses Ecrits seraient devenus des »lieux communs«, que l’on rencontrerait du Lacan à tous les coins de rue. Voilà. Et Lacan sur les P2P: un coup de pouce pour devenir »lieu commun«? … Après tout, les autres y sont déjà depuis longtemps. Qui pourrait bien penser qu’il y a un risque à ça?

»Ma façon de penser, dites-vous, ne peut être approuvée. Et que m’importe? Bien fou est celui qui adopte une façon de penser pour les autres! Ma façon de penser est le fruit de mes réflexions; elle tient à mon existence, à mon organisation. Je ne suis pas le maître de la changer; je le serais, que je ne le ferais pas. […] L’échafaud serait là, que je ne varierais pas.«

(Donatien-Alphonse-François de Sade, »Lettre à Mme de Sade«, Vincennes, Novembre 1783).

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